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Une brève histoire de la langue vietnamienne

À l’Atelier An Phu, nous savons qu’apprendre une langue ne se résume pas à mémoriser du vocabulaire : c’est aussi comprendre les récits, les influences et les identités qui façonnent la manière de parler des peuples.

La langue vietnamienne, le tiếng Việt, fruit de siècles de contacts, de colonisation, de résistance et d’adaptation, illustre à merveille cette complexité. 

Derrière ses lettres romaines et ses tons chantants, la langue vietnamienne incarne l’histoire du Vietnam lui-même. 

Partons dès à présent pour un voyage dans le temps, et découvrons le(s) coeur(s) de cette fascinante langue !

Les racines austroasiatiques et la domination chinoise

Le vietnamien appartient à la famille austroasiatique, au même titre que le khmer et plusieurs langues tribales d’Asie du Sud-Est et du nord-est de l’Inde. 

Les plus anciens ancêtres connus des Vietnamiens, les Lạc Việt, vivaient dans la région du delta du fleuve Rouge dès le premier millénaire avant notre ère. Les recherches linguistiques indiquent que leur langue possédait déjà les caractéristiques de base des langues austroasiatiques : racines monosyllabiques, ordre des mots sujet-verbe-objet, et absence de flexion.

Lorsque l’Empire chinois Han envahit le nord du Vietnam en 111 av. J.-C., il instaura plus de mille ans de domination (jusqu’en 939 apr. J.-C.). Pendant cette période, le chinois classique (chữ Hán) devint la langue de l’administration, de l’éducation et de la littérature.

Cependant, la langue parlée par le peuple vietnamien resta distincte et continua à être transmise oralement au quotidien. Cette situation de diglossie — l’utilisation parallèle de deux langues pour des fonctions différentes — a perduré pendant des siècles

Le vietnamien a alors intégré un grand nombre de mots chinois (selon certaines estimations, 60 % du lexique utilisé dans les contextes formels ou intellectuels aujourd’hui), tout en conservant une structure grammaticale austroasiatique.

Chu nom Source : https://vie.shisu.edu.cn/resources/news/content11637

Pour écrire le vietnamien oral, les lettrés ont commencé, dès le Xe siècle, à adapter les caractères chinois dans un système logographique indigène appelé chữ Nôm

Ce système combinait des caractères chinois empruntés à de nouveaux caractères inventés pour transcrire les sons et le sens des mots vietnamiens. 

Bien que riche et expressif, le chữ Nôm était difficile à standardiser et à enseigner, ce qui limitait l’alphabétisation aux seules élites.

Les missionnaires et la naissance de l’écriture romanisée

Les premières tentatives de transcription du vietnamien à l’aide de l’alphabet latin sont apparues avec l’arrivée des missionnaires européens au XVIIe siècle. On pense souvent à tort que les Français ont été les pionniers de la romanisation, mais ce sont en réalité des jésuites portugais et italiens qui ont posé les premières bases de cet alphabet pour le moins unique. 

Le premier à étudier et transcrire le vietnamien fut Francisco de Pina, un jésuite portugais basé à Hội An. Vers 1620, il commence à documenter la langue et conçoit un système de transcription phonétique basé sur l’alphabet romain. Son travail servira de fondation au quốc ngữ, l’actuelle écriture romanisée du vietnamien.

Des jésuites italiens comme Cristoforo Borri et Girolamo Maiorica poursuivent l’effort, rédigeant des textes religieux en vietnamien à l’attention des convertis locaux. Mais c’est Alexandre de Rhodes, jésuite français arrivé au Vietnam en 1627, qui laissera l’empreinte la plus durable.

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S’appuyant sur le système de de Pina, de Rhodes développe une orthographe plus rigoureuse et systématique. En 1651, il publie à Rome deux ouvrages majeurs : un lexique vietnamien-portugais-latin (Dictionarium Annamiticum Lusitanum et Latinum) et un catéchisme vietnamien, tous deux écrits en quốc ngữ.

Ce travail marque les débuts du script romanisé comme alternative sérieuse au chữ Nôm, bien que son usage reste encore cantonné aux cercles missionnaires pendant près de deux siècles.

La période coloniale française et l’essor du Quốc Ngữ

Lorsque la France entreprend la conquête du Vietnam à partir de 1858, menant à une domination complète dès 1885, l’administration coloniale juge le chữ Nôm inadapté à la gouvernance et à l’enseignement. 

En promouvant le quốc ngữ, les autorités coloniales souhaitent accroître l’alphabétisation, faciliter la communication et réduire l’influence culturelle des caractères chinois.

French Indochina Education - holylandindochinecoloniale.com

Dès le début du XXe siècle, le quốc ngữ est enseigné dans les écoles coloniales et utilisé dans la presse. Ironiquement, cette politique contribue à l’émergence du nationalisme vietnamien, car les nouvelles classes lettrées utilisent ce script pour publier des pamphlets anticoloniaux, des romans et des essais politiques. Après l’indépendance et la division du pays en 1954, le Nord comme le Sud déclarent le quốc ngữ système officiel. La transition est alors achevée.

La langue française a laissé une empreinte visible, notamment dans le vocabulaire. Selon les critères utilisés, environ 5 % du lexique quotidien vietnamien provient directement du français, surtout dans les domaines de la technologie, l’éducation, la gastronomie, les transports, la mode et l’administration. Voici quelques exemples courants :

  • ga (de gare, station de train)
  • sôcôla (de chocolat)
  • búp bê (de poupée)
  • ma-dăm (de madame)
  • cà phê (de café)
  • xe buýt (de bus)
  • pho mát (de fromage)

Ces mots sont intégrés à la phonétique vietnamienne et font pleinement partie de la langue moderne.

Une langue vivante : de la révolution à la mondialisation

Le vietnamien moderne, tel qu’il est parlé aujourd’hui, est le produit de cette longue histoire de convergence et de transformation. Il conserve la syntaxe austroasiatique, s’enrichit d’un vocabulaire d’origine chinoise et porte l’empreinte coloniale du français.

Elementary school students looking at computer

Ces dernières décennies, la mondialisation et la communication numérique ont introduit une nouvelle vague d’emprunts à l’anglais, notamment dans la culture jeune, les affaires et la technologie.

Le vietnamien reste une langue tonale, avec six tons dans les dialectes du Nord (Hanoï) et cinq dans ceux du Sud (Ho Chi Minh-Ville). Ces tons, essentiels au sens, sont indiqués par des signes diacritiques dans l’écriture.

Aujourd’hui, le vietnamien n’est pas seulement une langue nationale : c’est aussi une langue mondiale. Avec une population dépassant les 100 millions d’habitants et plus de 90 millions de locuteurs natifs, auxquels s’ajoutent 5 à 6 millions de Vietnamiens de la diaspora, le tiếng Việt compte parmi les langues les plus parlées dans le monde.

Quant à l’époque actuelle, on pourrait l’appeler l’ère numérique, marquée par la communication en ligne, l’hybridation linguistique et un regain d’intérêt pour les dialectes régionaux et les expressions traditionnelles. Le vietnamien évolue plus vite que jamais — nouveaux mots d’argot, néologismes venus des réseaux sociaux et expressions empruntées à l’anglais redéfinissent la manière de parler, notamment chez les jeunes générations.

FAQ

Combien de personnes parlent vietnamien dans le monde ?

On compte environ 95 à 100 millions de locuteurs natifs, presque tous au Vietnam. La diaspora vietnamienne ajoute 5 à 6 millions de locuteurs supplémentaires, notamment aux États-Unis, en France, en Australie, au Canada, en Allemagne et au Japon.

Le vietnamien est-il difficile à apprendre pour les étrangers ?

La grammaire vietnamienne est relativement simple : il n’y a pas de conjugaison de verbes, de genres nominaux ni d’articles. Cependant, le système tonal et la prononciation peuvent être difficiles pour les nouveaux apprenants. Une fois les tons et les sons maîtrisés, le reste devient beaucoup plus accessible.

Existe-t-il différents dialectes ?

Oui. Les trois principaux dialectes régionaux sont le nord (Hanoï), le centre (Hué) et le sud (Hô-Chi-Minh-Ville). Il existe des différences de prononciation, de vocabulaire et d’intonation. La plupart des apprenants du vietnamien commencent par le dialecte de Hanoï, utilisé dans l’enseignement et les médias officiels.

Quel système d’écriture les Vietnamiens utilisaient-ils avant l’alphabet latin ?
Les Vietnamiens utilisaient le chữ Hán (chinois classique) pour les documents officiels et le chữ Nôm pour écrire la langue vernaculaire. Ces deux systèmes logographiques basés sur les caractères chinois sont aujourd’hui considérés comme obsolètes, bien que le chữ Nôm soit étudié par les érudits et préservé dans les textes traditionnels.
Pourquoi le vietnamien possède-t-il autant de mots français et chinois ?

Le Vietnam étant un État tributaire de la Chine pendant mille ans et une colonie française pendant près d’un siècle, de nombreux termes chinois et français ont intégré la langue. Les mots chinois dominent dans les contextes formels et académiques, tandis que les emprunts français sont courants dans le vocabulaire courant.

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